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Les extérieurs
de la maison provençale
La terrasse - Les plantations - La
treille - L'eau - La
cour - L'accés à la maison
- Les jardins
Les espaces extérieurs en relation directe avec la maison provençale,
sont privilégiés. Il y a une telle symbiose entre l'intérieur
et l'extérieur qu'on ne peut concevoir l'un sans que l'autre en
soit déterminé. Dans ce parcours que nous venons d'effectuer
pour tenter de montrer ce qu'est une maison provençale, nous l'avons
évoqué à plusieurs reprises et montré que
cet espace n'est pas un simple accompagnement mais qu'il contribue à
la typologie. Cela fait un ensemble. Aussi, les exemples que nous avons
exposés, pris sur des maisons de tradition, semblent attacher autant
d'importance à ce qui fait l'extérieur par rapport à
l'intérieur et, s'il y a une frontière entre les deux, ne
serait-ce que par la porte et par son seuil, elle ne demande qu'à
être franchie.
L'extérieur, ici en Provence, réside essentiellement par la
terrasse qui borde la maison sur toute la longueur de sa façade
sud. C'est ensuite à partir de cette terrasse que d'autres espaces
vont se rattacher et venir en accompagnement. La longue terrasse est aussi
la part essentielle des abords, le coeur, et c'est à partir d'elle
que l'ensemble des lignes de compositon vont se rattacher.
La terrasse
Elle se présente comme une surface limitée par de petits murs
et qui longent la façade sud sur une largeur d'au moins trois à
cinq mètres. Elle a une position dominante par rapport aux autres
espaces rattachés à elle par des emmarchements.
C'est à la fois une aire où l'on se tient pour se rendre à
la porte d'entrée, aux portes de services. C'est un lieu abrité
du mistral, où la vue est bien dégagée. On aime, ici,
voir mais ne pas être vu. S'il y avait un seul élément
à traiter dans les composants de l'extérieur, on choisirait
sans nul doute la terrasse, car sans elle la maison ne serait vraiment pas
ce qu'elle est.
Espace de transition mais aussi lieu de séjour. Transition entre
les autres parties du jardin : jardin d'agrément, jardin potager,
verger, jardin de fleurs, etc et la campagne. Lieu où l'on se tient
sur un banc, dans des fauteuils de paille, sur des chaises, le long de la
grande table placée sous la treille. Par cette terrasse, le cheval
ou le mulet accédaient à l'écurie. Le poulailler, la
porcherie, étaient généralement plus à l'écart,
la partie du séjour se situant devant la pièce commune.
C'est donc l'espace privilégié immédiatement accessible
à partir de la pièce commune ; on la sent toute proche. On
passe de l'une à l'autre, aussi facilement que d'une pièce
à une autre. Ici, il n'y a pas de toit, c'est peut-être la
seule différence. On voit le ciel. On s'assied sur le banc de pierre
qui est adossé à la façade pour rester là, à
méditer sur l'espace. C'est ici que l'on apprend à ne rien
faire. Mais, c'est aussi un passage obligé pour se rendre dans la
maison. On aime bien aussi observer. L'hiver, on prend le soleil de plein
fouet. L'été, on se place à côté, sous
la treille pour se garantir de ses ardeurs.
Que cela soit un simple mas ou une bastide au parti développé,
la longue terrasse, le long de la façade sud est une constante essentielle.
Chacune d'entre celles que nous avons visitées et, malgré
la simplicité souvent de son traitement, dégage une personnalité
qui s'harmonise avec la construction. C'est, en fait, une cinquième
façade, ce plan horizontal, à partir duquel la façade
sud peut s'apprécier et prendre sa valeur. La position de la maison
sur le terrain entraîne donc celle de la terrasse qui se trouve ainsi
portée par elle.
C'est généralement un espace limité, architecturé,
même s'il vient accompagner le mas élémentaire. Ainsi,
sur le long côté sud, un simple mur d'appui d'une hauteur de
0,60 à 0,80 m. permet de ne pas couper la vue mais de maintenir ce
large replat horizontal. Il servira de support à la treille et aussi
pour poser des pots de fleurs.
Le traitement de cette surface est, en général, d'une grande
sobriété : quelques dalles de pierre au niveau de la porte
d'entrée, du gravier pour la surface courante, une calade pour marquer
un trottoir et établir des caniveaux pour les eaux de ruissellement.
On trouve souvent un trotoir large d'un mètre environ le long de
cette façade.

Plantations
Les plantations qui sont placées sur cette terrasse sont des arbres
d'ombrage, comme le platane ou le mûrier-platane. En général,
il y a trois arbres. On n'aime pas le chiffre 1 ou 2. La présence
de ces arbres à haute tige trop près de la façade a
pour inconvénient de permettre aux racines de s'infiltrer sous la
maison et de faire remonter le dallage (le volume des racines dans le sol
est sensiblement le même que le volume de l'arbre !). Il faut donc
éloigner ces grands arbres parcequ'il n'est pas rare qu'un de ces
arbres fauché par la foudre se retrouve dans la maison.
Par crainte des incendies, on a tendance à éviter la présence
d'arbres, proches de la maison qui se transforment en torches. Pour ces
trois raisons, on préfère les éloigner et les planter
sur une terrasse en contre-bas et peut de ce fait, apporter un ombrage à
la terrasse principale sans entraîner les inconvénients cités.
 
Treille
On peut distinguer deux sortes de treilles : celle qui est rattachée
uniquement à la façade, par des consoles en ferronnerie, qui
est donc courte, ne donnant qu'un ombrage timide ; le pied de vigne est
situé contre la façade ; il grimpe et s'étale sur des
fils de fer tenus par des consoles.
La treille, qui est constituée par un véritable
berceau de verdure, est suffisamment large pour s'y tenir. Cette treille
nécessite plusieurs pieds de vigne ou autres plantes grimpantes comme
l'empilopsys, la glycine, etc Il faut que le feuillage soit abondant pour
porter ombre, caduque pour que, l'hiver, le soleil ne soit pas interrompu
et puisse frapper les fenêtres. Ce berceau nécessite une ossature
métallique composée de verticales qui prennent appui sur le
muret, soit des potelets forgés, des colonnes de pierre, des piliers
en pierre et des arceaux qui partent de ce point pour aller se fixer sur
la façade.
La position de la treille sur la terrasse, va déterminer le lieu
de vie en été, généralement situé à
proximité de la porte qui donne accès à la pièce
commune. La treille constitue l'aménagement essentiel d'une terrasse,
véritable pièce d'été.

L'eau
L'eau est présente sur cette terrasse dans tous les cas de figures,
sous forme de fontaine à buffet d'eau, à pilier et à
bassin avec lavoir adossé à un mur ou à un bâtiment,
un puits, un abreuvoir, etc Un mur de retour reçoit le canon de la
fontaine qui coule ensuite dans un ou plusieurs bassins en pierre. Le ruissellement
de cette eau, son bruit, son énergie est plus qu'un attrait supplémentaire
: c'est la vie qui coule et que l'on considère ici, comme une véritable
richesse.
Des bassins en amont servent de réservoirs qui alimentent la fontaine
adossée et, plus bas, sur une restanque, une fontaine-bassin de forme
circulaire. La même eau circule pour ressortir à des points
forts de l'espace, en apportant l'usage et le rafraîchissement. On
raconte ici l'histoire d'un paysan qui voulait vendre son cabanon à
un citadin. Celui-ci s'est étonné du prix élevé
de ce qui n'était qu'un toit posé sur quelques pierres attachées
à un bout de terre, s'entendit répondre par le propriétaire,
qu'un puits adossé donnait une eau si fraîche que c'était
à elle seule un véritable régal. Pour la bonne peine,
il sortit des verres et une bouteille de pastis. Devant l'acheteur, tout
prêt à assister à ce prodige, il alla au puits, fit
tomber le seau que l'on entendit frapper l'eau, puis le reposa sur la margelle.
Il remplit les deux verres. L'autre fut tellement rassasié de cette
eau glacée, qu'il en accepta le prix et toutes les conditions sans
s'apercevoir qu'avant son arrivée, le paysan avait fait tomber deux
ou trois pains de glace dans le puits.
Notre acheteur ne s'aperçut de cette méprise que plus tard,
quand il prit possession de son bien et voulut goûter à son
premier verre de propriétaire. Il n'y avait pratiquement plus d'eau
dans le puits, mais le peu d'eau qui restait était abominablement
chaude comme une lavasse.

Cour
La cour intérieure se retrouve fréquemment en Provence que
cela soit pour des mas des Alpilles ou des mas du Luberon. Elle se présente
comme une terrasse mais d'une surface plus importante et limitée
par ses quatre côtés. Si le corps du bâtiment principal
se trouve, comme toujours, face au sud, des bâtiments annexes viennent
le limiter de part et d'autre. Des murs de clôture avec le porche
d'entrée, la ferment sur le quatrième côté. Cette
cour est le plus souvent obtenue par des rajouts successifs de bâtiments
et finit par se fermer en fin d'évolution. C'est essentiellement
un espace d'activité pour l'exploitation agricole mais on retrouve
dans une de ces parties proches de la porte d'entrée qui mène
à la pièce commune, un aménagement "terrasse"
avec la treille, la table extérieure et le banc. Etant donné
que l'on bénéficie de plus de recul, des arbres d'ombrage
ponctuent cette surface : platanes, l'arbre par excellence de la Provence.
 
Accès à la maison
Que cela soit une bastide, un mas, un cabanon, l'accès se fait sur
le côté par un petit chemin de terre, de sol stabilisé.
On a l'impression que le provençal ne veut pas mettre en évidence
son bien. Il préfère le cacher, ne pas "s'afficher".
Etant donné que la maison offre sa façade principale au sud,
on arrive par l'est ou par l'ouest. J'ai remarqué que l'on arrivait
plus souvent sur le côté est que sur le côté ouest,
encore que cette observation ne peut être donnée qu'avec mesure.
Même pour une bastide historique, comme la Mignarde ou La Gaude, on
arrive par une allée bordée de platanes, sur le côté.
A La Gaude, cette allée est soulignée par une allée
de buis. Au mas des Anguilles, dans la Crau, on semble arriver de face ;
en fait, l'implantation des bâtiments est en oblique par rapport à
cette allée bordée de platanes majestueux.
Arriver de face donnerait un côté trop solennel, trop "m'as-tu-vu".
On préfère ici la discrétion. Souvent, on prend une
modeste allée et on est surpris de tomber sur des corps de bâtiments
imposants que celle-ci ne laissait pas préfigurer.

Les jardins
Ils sont composés à partir de la terrasse. C'est elle qui
crée la rotule entre eux. De la terrasse, on descend au jardin d'agrément
par quelques marches agrémentées souvent d'un bassin que l'on
peut voir de la terrasse supérieure.
C'est un jardin ordonnancé, structuré, qui peut aller jusqu'à
une composition géométrique à la française,
marqué par des parterres soulignés par des bandes de buis
ou par de simples allées qui tendent cette structure.
De ce jardin d'agrément, on peut aller de part et d'autre au jardin
potager, au verger. Au delà de ces lignes, on laisse la campagne
s'exprimer.
Cette structure se fait aussi par des éléments maçonnés
qui permettent de souligner un point fort, un axe, etc
 
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